SOLIDARITé YVES MICHAUD
Défense de la liberté dopinion
et dexpression
B.P. 1013, Succ. Snowdon, Montréal ( Québec) H3X 3Y1
Montréal, le 5 février 2001
Monsieur Lucien Bouchard
Premier ministre du Québec
Hôtel du Gouvernement
Québec
Monsieur le premier ministre,
Je vous écris en ma
qualité de président et au nom des dirigeants de SOLIDARITé YVES MICHAUD pour
la défense et la liberté dopinion et dexpression. Notre association
estime représenter plusieurs milliers de citoyennes et de citoyens du Québec
qui se sont sentis personnellement offensés par le vote unanime de blâme de lAssemblée
nationale à lendroit de lun des grands serviteurs du Québec et de la
cause souverainiste. Vous avez été avec M. Jean Charest, linstigateur de ce
vote qui passera à lHistoire comme une flétrissure de la démocratie
québécoise. Les torts ainsi causés sont réparables si vous y mettez un peu dhumilité
et de bonne volonté.
Notre association
souhaite que vous ne laissiez pas à votre successeur la facture dune
réparation à lhonneur, la réputation et la dignité de M. Yves Michaud. En
votre qualité dancien diplomate, vous avez le sens des convenances et de la
politesse. Laisser laddition dune faute à un tiers ne nous semble pas
correspondre à votre réputation dhomme policé et respectueux des bonnes
manières. Votre bilan aux affaires de notre nation est globalement positif et
il serait dommage que vous inscriviez à son passif le refus de régler une
regrettable affaire dont vous êtes au premier chef responsable.
La première partie de
votre allocution lors de lannonce de votre démission du poste de premier
ministre du Québec ne manquait pas délévation. La dernière partie, en
revanche, a consterné nombre de Québécoises, de Québécois et détrangers
qui ont appris de votre bouche lexistence dun soi-disant débat dans notre
société sur les souffrances du peuple juif. Ce fut la première nouvelle pour
limmense majorité dentre eux . Le mot na jamais été prononcé par
personne, sauf par vous, dans une « affaire » que vous connaissez bien. Le
citoyen Yves Michaud, connu pour les services qu’il a rendus au peuple
québécois, n’a dit qu’une seule chose en réponse à un sénateur libéral de
confession juive : « Dautres peuples ont aussi souffert dans lhistoire
de lhumanité. » évidence. Constat. Rien de racial en cela. Rien
qui justifie lacharnement à lendroit dun citoyen respecté et
respectable, rien qui justifie les doutes que vous avez soulevés sur louverture
et la générosité de notre société envers lensemble de ses citoyens. Vous
savez mieux que quiconque que le Québec nest pas raciste et quil pratique
au contraire depuis toujours sur son territoire une politique exemplaire à légard
de ses minorités, des immigrants, et des communautés culturelles qui
enrichissent son patrimoine national.
Le jour de la mort dAndré
DAllemagne vous lui vous rendiez un hommage juste et émouvant en concluant
quil « possédait toutes les qualités du militant fermement engagé. »
Vous nêtes pas sans savoir que quelques semaines avant sa mort, le 26
décembre 2000, il écrivait à la vice-présidente du Parti Québécois, Marie
Malavoy : « Suite à lodieuse résolution adoptée par lAssemblée
nationale le 14 décembre, et particulièrement à linacceptable conduite du
gouvernement et des députés du Parti Québécois en cette occasion, je vous
renvoie ci-joint ma carte de membre. Sachez bien quil men coûte de rompre
ainsi une fidélité de plus de trente ans, mais je ne peux adhérer à un parti
qui, alors quil est au pouvoir participe à des manoeuvres qui transforment
le Parlement en une sorte de tribunal inquisitoire et porte gravement atteinte
au droit de libre expression ».
à lexemple dAndré
DAllemagne, nombreux sont les militantes et les militants qui sinterrogent
sur leur fidélité au Parti Québécois suite au vote de blâme de lAssemblée
nationale. Sil ny a pas de votre part, un geste, un mot, une déclaration
, pour réparer les torts causés à la réputation dun grand serviteur du
Québec et pour reconnaître au moins que les élus de la formation politique
que vous présidiez ont porté atteinte sans raison valable ni motifs sérieux
à lhonneur dun citoyen, le risque est grand quil y ait désaffection
chez nombre de militantes et de militants. Deux mois seront bientôt écoulés
depuis le 14 décembre 2000, jour du vote de lAssemblée nationale, et nous
recevons encore quotidiennement des protestations à lencontre du
comportement inadmissible des députés.
Vous pourriez clore
cette triste affaire par les moyens de votre choix et réparer les torts causés
à Yves Michaud. Ne partez pas en laissant un boulet que votre successeur devra
traîner jusquà une forme ou une autre de repentance. Vous rendriez ainsi,
avant votre départ, un service insigne à la nation que vous avez, à linstar
dautres, servie avec générosité et dévouement.
Veuillez agréer, monsieur le Premier
ministre, lexpression de ma haute considération.
Jean-Pierre Bonhomme
Président
Original par courrier postal
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Jean-Pierre Bonhomme, président : 899-8791 Me Jacques Carey, secrétaire : 598-9281 |