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La lumière est faite sur Leamy, ce triste personnage! (3e article d’une série de trois)

Andrew Leamy 2021 - Photo d'Albert Lebeau
Andrew Leamy 2021 – Photo d’Albert Lebeau

Nonobstant tout ce qui précède, il est regrettable de constater qu’aucun gestionnaire responsable du programme du patrimoine à la CCN n’avait jugé bon de faire un examen minutieux (vetting) sur Andrew Leamy avant de retenir son nom pour un important projet récréo-touristique. Maintenant que la lumière a été faite sur ce triste personnage, nous exigeons donc des autorités politiques que ce nom soit retiré de l’espace public!

3e article sur une série de trois
1er article 1 – Andrew Leamy, criminel ou assassin?
2e  article 2 – Qu’attendent les autorités politiques?
3e   article 3 – La lumière est faite sur Andrew Leamy

par Albert LeBeau

Maintenant que nous connaissons mieux qui était Andrew Leamy nous nous devons également d’en savoir plus sur l’histoire du petit lac qui porte son nom et, pourquoi il est primordial de le changer.

À l’arrivée du pionnier Philemon Wright à l’embouchure de la rivière Gatineau Circa 1800, il y avait à une courte distance (213 mètres ou 700 pieds) à l’ouest de l’entrée de cette importante rivière, un petit étang d’eaux stagnantes qu’il nomma l’étang Columbia ou … « Columbia Pond ».

Cette section de sa grande propriété, connue sous le nom de Gateno Farm, a servi de ferme d’élevage de bétail et a été créée et gérée par son fils aîné, Philemon Junior. Cette information nous est confirmée en 1824 dans un rapport officiel de Philemon Wright père, déposé à l’Assemblée du Bas-Canada à Québec. Ce rapport descriptif est également accompagné d’une carte et le tout est intitulé Sketch of the first settlement on the Ottawa or Grand River.

En effet, ce rapport affirmait ceci : « Cette ferme a été créée par P. Wright Jr., elle s’appelle la ferme Gateno, la première à avoir été créée sur la Grande rivière ou rivière des Outaouais et a servi de ferme d’élevage. En raison des eaux de source (et neiges abondantes) qui la recouvrent environ une fois tous les 7 ans, nous sommes parfois obligés de mettre les animaux et le bétail sur les hauts plateaux, car les eaux restent environ 10 jours sur cette prairie. Cette ferme est maintenant gérée par Sarah Wright ».

Sarah « Sally » Olmstead-Wright était la veuve de Philemon Wright fils et la mère de Erexina Wright, l’héritière de Philemon Wright fils. À la suite du décès de son époux, Sarah Olmstead joignait sa destinée à celle de Nicholas Sparks en 1826.

Andrew LeamyDonc, en 1821 Philemon Wright fils étant décédé dans un accident de calèche près de Grenville, sa veuve Sarah Olmstead, continua plus ou moins l’exploitation de la ferme Gateno jusqu’au jour ou l’héritière, sa fille Erexina qui n’avait que 15 ans en 1835, l’offrit comme dot à son époux Andrew Leamy, un louche associé d’affaires de sa famille. Force est de croire que, contrairement à ce qu’affirment certains biographes ou historiens, Andrew Leamy n’a jamais payé, en pièces sonnantes et trébuchantes, cette propriété qui aujourd’hui porte son nom. Andrew Leamy, jeune homme de 25 ans, n’a eu qu’à investir quelques dollars pour l’achat d’une bague qu’il mettra ensuite au doigt de la belle Erexina-Elizabeth Wright le dimanche 31 mai 1835, le jour de leurs noces, célébrées à l’église catholique Notre-Dame de Bytown.

L’Étang Columbia, cette petite étendue d’eau stagnante à l’intérieur des terres de la Ferme Gateno, était sans importance pour l’industrie forestière d’alors. L’étang ne deviendrait « un lac » que le jour où celui-ci recevrait un apport d’eau d’affluents importants; soit de quelques ruisseaux ou mieux encore, d’une importante rivière comme … la Gatineau. Il va de soi que ce petit lac, qui serait ainsi créé, devait aussi se vider dans un autre lac ou cours d’eau (l’Outaouais) via un petit ruisseau ou, pour une éventuelle entreprise industrielle qui pourrait s’y établir, par une imposante décharge ou chenal … également à excaver. Andrew Leamy, le bras droit du brigand Peter Aylen, Head of the Shiners, n’avait pas les moyens financiers pour entreprendre de si grands travaux.

Aux environs de 1845, le gouvernement du Canada-Uni fit d’importants travaux d’infrastructures (canaux et glissoirs à billots) pour l’industrie forestière du Comté d’Ottawa. Afin de créer une zone de triage pour les billots qui descendaient la rivière Gatineau et ainsi désengorger l’énorme mer de billots qui encombrait chaque printemps les rivières Gatineau et des Outaouais, le gouvernement y a construit; en dynamitant au travers le roc, un important et dispendieux canal d’une longueur de 213 mètres entre la rivière Gatineau et le petit étang Columbia. L’étang est ainsi devenu un petit lac … ayant désormais une vocation industrielle!

Une fois ces travaux complétés sur « sa propriété », Andrew Leamy en profita pour immédiatement construire une nouvelle « scierie-à-vapeur » à l’entrée du petit lac qui servait maintenant de zone de triage des billots. Cette scierie n’était que la deuxième du genre au Canada, à savoir, à ne pas être actionnée par des forces hydrauliques (1). Celle-ci venait aussi concurrencer des entreprises déjà bien établies et financièrement plus solides, telles que l’énorme usine de la famille Gilmour de Chelsea, légèrement en amont sur la rivière Gatineau ainsi qu’une des grandes usines de la famille Wright située à Hull (2).

Paradoxalement la scierie-à-vapeur « d’avant-garde » d’Andrew Leamy n’a été en activité que pendant une bonne dizaine d’années, à savoir entre 1853-54 et le 9 août 1867, date à laquelle elle fut détruite par une énorme explosion de sa bouilloire principale, souvent défectueuse (3). Cette explosion qui était due, selon plusieurs employés; à une culture de négligence de la part du propriétaire, a fait quelques victimes et plusieurs blessés dont un fils de Monsieur Leamy. L’usine ne fut jamais reconstruite par le propriétaire pour ce que plusieurs évaluaient, fort à propos, à une question de « foul play » (4).

À la suite de l’explosion et de la destruction de l’usine, le petit lac reprit sa vocation première, à savoir, de centre de triage de billots de la rivière Gatineau ainsi que l’assemblage de « cageux » pour expédition vers Québec et l’Angleterre, et ce, jusqu’à la fin de l’âge d’or des barons du bois. Par la suite durant les années 1950-1960 le Gouvernement du Canada (CCN) a fait l’acquisition des anciennes terres de la Gateno Farm pour qu’aujourd’hui cet endroit agréable soit reconnu pour sa vocation récréative.

Nonobstant tout ce qui précède, il est regrettable de constater qu’aucun gestionnaire responsable du programme du patrimoine à la CCN n’avait jugé bon de faire un examen minutieux (vetting) sur Andrew Leamy avant de retenir son nom pour un important projet récréo-touristique. Maintenant que la lumière a été faite sur ce triste personnage, nous exigeons donc des autorités politiques que ce nom soit retiré de l’espace public!

Sur le même sujet :
Un article récent en anglais au sujet de Peter Aylen et ses Shiners… Plus que des mauvais garnements à
Extrait de CityNews : « Remember This? Peter Aylen and Ottawa hooligan group « the Shiners »

Notes :

  1. En 1849 à Rockliffe, devant l’embouchure de la Gatineau, les frères Blasdell construisirent la première grande scierie activée par la vapeur. Ses 24 scies coupaient 1,000 pieds à l’heure.- City on the Ottawa, Courtney C.J. Bond.
  2. Bizarrement en 1868, un an après l’explosion de l’usine Leamy et suite au décès mystérieux de son propriétaire, la compagnie Wright, Batson and Currier met en production sa nouvelle « scierie-à-vapeur » à Hull sur la propriété de la famille Wright. Cette usine produit en 1871 plus de 30 millions de pieds cubes de bois de charpente. Histoire de l’Outaouais, Chad Gaffield, 1994.
  3. Andrew Rogers, ingénieur-en-chef de l’usine a affirmé lors de l’enquête du coroner qui suivit, qu’il craignait les deux bouilloires de M. Leamy à cause, de ce qu’il qualifiait, « d’erreurs de conception ».
  4. Il faut savoir qu’en 1844 Andrew Leamy avait réglé une première faillite … il était « Banqueroutier ». R.G. Dun de la futur compagnie Dun & Bradstreet fait l’évaluation de solvabilité des entreprises de la région de l’Outaouais entre 1850 et 1870. Les rapports concernant 96 entreprises sont fournis : 50 sont considérées comme prospères, 27 éprouvent des difficultés et 19 connaissent des échecs. – ANC, R.G. Dun Co. files.

 

Adresses utiles :

Mathieu Lacombe
Ministre responsable de l’Outaouais
Mathieu.Lacombe.PAPI@assnat.qc.ca
Steven Guilbeault
Ministre du Patrimoine
Steven.Guilbeault@parl.gc.ca
Simon Jolin-Barrette
Ministre responsable de la Langue française
ministre@justice.gouv.qc.ca
Commission de toponymie du Québec
topo@toponymie.gouv.qc.ca
Nathalie Roy
Ministre de la Culture et des Communication
ministre@mcc.gouv.qc.ca
Jonathan Wilkinson
Ministre Environnement et Changement climatique
Jonathan.Wilkinson@parl.gc.ca
Maire de Gatineau
maire@gatineau.ca
Commission de toponymie de Gatineau
Nadeau.myriam@gatineau.ca
fortin.anick@gatineau.ca
Commission de la capitale fédérale
info@ncc-ccn.ca
Parcs Canada
pc.information.pc@canada.ca

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