Un auteur s’inquiétait récemment de notre avenir national dans une revue sérieuse. Il écrivait « que, pour maintenir le poids relatif à long terme des francophones au Québec, il faudrait :1) que les transferts linguistiques des immigrants aillent à 90% environ vers le français et 2) que les francophones n’effectuent pas de transferts nets vers l’anglais. » Il ne mentionnait aucune autre condition. Or, pour assurer le maintien de la langue française chez nous, il devra d’abord y avoir des habitants qui la parlent. La diminution progressive des francophones ici doit donc nous inquiéter.
Le taux de natalité moyen depuis 1965 au Québec est de 1,73 enfant par femme, avec un creux de 1,36 en 1987. Selon les prévisions, à partir de 2032, le nombre des décès dépassera celui des naissances. Le renouvellement de la population ne sera plus assuré. De fait, il faut un taux de 2,1 enfants par femme pour atteindre cet équilibre. Certains prévoient même un Québec de 4 millions d’habitants en 2100. Difficile à croire, mais… ! En outre, il faut noter que le groupe francophone au Québec est passé de 79% en 1971 à 64% en 2014, qu’il passerait à 50% en 2042 et à 45% en 2050.
Comment peut-on parler alors de l’avenir du français chez nous sans penser au phénomène de la dénatalité ? Comment expliquer le quasi-silence sur cette question, devenue taboue, de la part des dirigeants politiques, des influenceurs et des défenseurs de la langue ? Craignent-ils de se faire rappeler que les Québécoises ne sont pas des « poules pondeuses » ni les Québécois des « étalons » ?
En 1981, quand René Lévesque a fait des promesses électorales « natalistes », des femmes progressistes ont dénoncé son projet. En 1985, le Conseil du statut de la femme a même répondu à la Commission parlementaire de la Culture qui s’inquiétait du manque de main-d’oeuvre : « S’il y a un problème, réglez-le par l’immigration, pas par une politique nataliste. » Comment expliquer une telle prise de position de la part de personnes responsables ? C’était confier le problème à des populations étrangères.
Nos grands-parents ont eu trop d’enfants, paraît-il, mais ils ont réussi à mettre en échec, pendant plus de deux siècles, la politique assimilatrice des Britanniques et une immigration massive destinée à faire du Québec un pays majoritairement anglophone. Sans leur fertilité exceptionnelle, nous serions aujourd’hui une minorité négligeable. La faible fécondité des générations actuelles est préoccupante.
Il est bon de rappeler que certains et certaines se sont déjà inquiétés de la question.
Bernard Landry s’inquiète de notre avenir économique : « … on a un défi monstrueux, qui est la démographie… La population vieillit avec le résultat qu’on manque de main-d’oeuvre. »
Le sociologue Gérard Bergeron a déjà constaté : « … il est un seul argument objectif, irréfutable, qui milite pour l’indépendance : c’est notre décroissance démographique. Nous avions la langue, la religion, le nombre. … Nous perdons le nombre à un rythme qui décroît plus rapidement que dans les autres régions canadiennes : nous ne pouvons compenser cette perdition par l’addition de l’immigration francophone ou francophonisante. »
Lise Payette pose la question : « Nous ne faisons plus d’enfants, en tous cas pas assez pour renouveler la population… Il y a même des gens pour dire que nous allons disparaître… Pouvons-nous recommencer à faire des enfants ? »
Denise Bombardier s’interroge : « Dans cet effondrement linguistique, l’un des plus bas taux dans le monde, n’y a-t-il pas aussi l’expression d’une désespérance collective ? »
Certains ont fait des suggestions pour corriger la situation actuelle. Ainsi, en 2005, le président du Collège des médecins, Yves Lamontagne, a suggéré l’abandon de la gratuité pour la vasectomie et la ligature des trompes puisqu’on est loin d’une maladie. De con côté, Bernard Landry a mentionné en 2007 que le Québec avait le plus haut taux de ligatures et d’avortements en Occident. C’est un championnat qu’il faut noter.
Nos penseurs doivent s’exprimer sur la natalité. Nos dirigeantes et dirigeants doivent agir dans la mesure de leurs moyens par des mesures positives. Notre gouvernement doit adopter une législation nataliste pour aider les familles qui désirent avoir des enfants et qui ont besoin d’une aide financière ou sociétale. Il est grand temps d’agir. La natalité, un must, pour parler anglais ! un impératif ! Elle est indispensable à notre survie. Elle doit faire partie de la panoplie des moyens dont nous disposons.
Robert AUCLAIR Gaston BERNIER
Texte diffusé par la Société nationale des Québécois et Québécoises de la Capitale
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