Concours eurovision de la chanson (suite)
Sur le site du magistrat Philippe Bilger, http://www.philippebilger.com/ , on peut lire ce qui suit à propos de cette rocambolesque affaire dans laquelle le service public de télévision prétend faire représenter la France au prochain concours de l’Eurovision par une chanson en … anglais (voir mon courriel du 20 avril à ce sujet à https://www.imperatif-francais.org/bienvenu/articles/2008/anglomanie.html ).
Le point de vue évoqué ici est tout à fait intéressant, même si, je le répète, ce sont les pouvoirs et services publics concernés qui sont à incriminer.
Jean-Pierre Busnel
jpabusnel@wanadoo.fr
——————————————————————————————-
"Chanter faux
C’est dans le Parisien que j’ai lu cette "Controverse à l’Eurovision".
Sébastien Tellier, qui représente la France à ce Concours avec "Divine", va interpréter sa chanson en anglais.
Le député UMP de l’Oise Franois-Michel Gonnot a mille fois raison de s’indigner et de considérer, en particulier, qu’il s’agit "d’un mauvais signe adressé à la communauté francophone". Ce parlementaire a saisi la ministre de la Culture pour qu’elle effectue toutes les démarches nécessaires auprès de France 3 et de l’Eurovision afin d’éviter ce scandale.
Car ce serait, en effet, un scandale. Comment le producteur de Sébastien Tellier, Marc Teissier du Cros, peut-il proférer cette ânerie : "un combat d’arrière-garde" ? C’est tout le contraire. Défendre sa langue, exiger de ceux qui ont l’honneur de représenter la France, de chanter ou de parler en son nom, l’élémentaire élégance d’user de ce patrimoine royal et magique que constituent les mots polis par l’Histoire et les usages, autant d’impératifs qui, loin d’être régressifs, sont d’une modernité infinie. Le ringard accable plutôt les lâches et les imprudents qui se laissent confisquer un trésor, tout simplement parce qu’ils n’ont plus la force ni le talent pour le sauvegarder, voire l’enrichir.
On ne sait plus écrire le français, on parle mal le français même dans les instances médiatiques et les élites politico-intellectuelles. Et c’est le moment où on porterait le coup de pied de l’âne à ce qui se délite, à ce qu’il faut retenir par l’esprit, l’envie et la culture. Peu importe que l’exercice soit futile. Sur ce plan, il n’est pas de petits combats.
Je sais bien que la langue française, la communauté francophone, réduites, abaissées, reflètent la perte de puissance de notre pays, sa dévaluation politique, sa réduction sur le plan international. C’est une banalité de soutenir qu’une langue se porte d’autant mieux qu’elle est abritée par une société et un Etat sûrs d’eux et capables de séduire et de convaincre au-delà d’eux.
Les grands défis ne sont pas à notre portée. Le Concours de l’Eurovision, si. Si nous amplifions, si nous devançons le désastre qui nous pend à la culture, nous n’aurons pas à nous plaindre.
Demandons à Sébastien Tellier, dont la musique semble jolie, de ne pas chanter faux. Contre sa langue. Contre la nôtre.
Ne nous laissons pas faire."