Dans l’essai du candidat Sarkozy, intitulé «Témoignage», et paru en juillet 2006 aux Editions XO, ce que l’on peut lire à la page 267 ne laisse aucun doute sur ce que l’auteur veut laisser entendre : la francophonie serait bien entendu encore coupable !
Jugez-en par vous-même en lisant l’extrait que voici :
« Les grands débats internationaux
La France devra enfin être partie prenante, dans les organismes internationaux à tous les grands débats (…) Les sujets ne manquent pas et cette liste n’est pas exhaustive. Pour peser davantage dans ces débats, il nous faut à la fois redevenir exemplaire sur le plan intérieur et accroître notre présence stratégique dans les négociations et les organismes internationaux. Être plus forts ne signifie pas être plus durs, mais plus incontournables. Or aujourd’hui notre politique d’intransigeance linguistique nous rend inaudibles.
Au nom dela francophonie, nous refusons de parler dans une autre langue que le français dans les négociations internationales, y compris dans les discussions informelles qui sont souvent les plus importantes.
Nous sommes ainsi à la fois perçus comme arrogants et exclus des débats !
Dans le même temps, nous avons supprimé par milliers des places d’enseignement du français à l’étranger et des bourses pour permettre à des étudiants étrangers de venir apprendre notre langue en France. C’est totalement contradictoire. Je crois qu’il est temps de sortir de cette hypocrisie dont nous sommes les premières victimes.
Bien sûr, nous devons continuer d’exiger qu’il soit parlé en français quand le statut officiel de notre langue l’exige. Mais nous devons nous donner les moyens de comprendre et de parler les autre langues, notamment l’anglais, y compris de manière subtile et technique. C’est ainsi que nous amènerons nos partenaires à comprendre, à leur tour, l’intérêt qu’ils auraient à parler notre langue. »
Ayant lu cela, voici les questions que je pose au candidat Sarkozy :
- « Notre politique d’intransigeance linguistique nous rend inaudibles », écrivez-vous. Mais, savez- vous quels pays se sont le plus battu, et ont finalement obtenu gain de cause, pour l’élaboration et l’adoption de la convention de l’Unesco en faveur de la diversité culturelle et linguistique?
Les pays de la Francophonie, et la France en tête ! - Pourriez-vous citer les trois hommes inspirateurs de la fondation de la Francophonie ? De quels pays étaient-ils ?
Réponse : Bourguiba, de Tunisie ; Senghor, du Sénégal ; Diori, du Niger.
Il est vrai que la France s’est montrée dès l’origine réticente à cette idée d’espace francophone. Il n’est pas étonnant qu’elle le soit encore… - « Bien sûr, nous devons continuer d’exiger qu’il soit parlé en français quand le statut officiel de notre langue l’exige », écrivez-vous encore.
Très bien. Mais, le français n’est- il pas l’une des langues officielles de l’Europe ? Alors, pourquoi laisse-t-on certains représentants officiels français s’exprimer en anglais à Bruxelles ? Pourquoi la délégation française s’est-elle exprimée en anglais pour le dossier de candidature des jeux olympiques, tandis que la délégation anglaise le faisait en… français ?! - Comment se fait-il, selon vous, que les organisations syndicales soient aujourd’hui conduites à revendiquer le respect de l’application de la loi Toubon dans les entreprises ? Est-ce de l’arrogance que de réclamer le droit de travailler en français en France ?
Ces questions étant posées, il apparait en fait que M. Sarkozy, comme M. Kouchner et bien d’autres messieurs de « l’élite », ne connaissent ni l’histoire ni les enjeux économiques majeurs de la Francophonie.
Défendre l’emploi du français, c’est defendre les intérêts de la communauté Francophone et rendre un hommage aux fondateurs Africains.
Invitons les « zélites » à lire l’article «Francophonie, la trahison des clercs» paru dans Le nouvel Economiste du jeudi 16 novembre (No 1366) et à méditer les trois aspects que cet hebdomadaire a mis en exergue :
- «La Francophonie pourrait jouer le rôle de laboratoire de la diversité linguistique contre l’uniformisation qui pénalise les économies non anglo-saxonnes. En Afrique, les chefs d’Etat s’interrogeraient sur la nécessité de continuer à promouvoir le français alors qu’eux mêmes seraient obligés de venir négocier en anglais à Bruxelles.»
- «Le langage impose une certaine vision du monde et des relations humaines en même temps qu’un système de pensée.»
« En ne conservant qu’une seule langue, on crée une discrimination, un rapport hiérarchique entre ceux pour lesquels l’anglais est la langue maternelle et les autres. »
Source:
Thibaud Sallé Phelippes de La Marnierre
lamarnierre@videotron.ca
(Le 11 avril 2007)