À l’occasion de la journée mondiale contre le sida, le gouvernement français a décidé d’accélérer la mise en place de distributeurs de préservatifs dans les lycées. Comme dit un quotidien (Aujourd’hui en France du 1er décembre) : "Enfin des distributeurs de préservatifs au lycée … Depuis quelques jours, c’est le branle-bas de combat dans toutes les académies de l’Hexagone. Le challenge : faire en sorte que tous les lycées de France soient équipés d’ici le mois de février d’un, voire de deux distributeurs de préservatifs à 0,20 € l’unité." Le ministre de l’Education nationale, M. Xavier Darcos, vient, paraît-il, "de débloquer 1,6 million d’euros, à répartir entre les différentes académies."
Nom de baptême de cette opération de communication dans les lycées : "Be love" (voir ci-contre). Elle dispose, bien entendu, de son propre site WEB : www.be-love.fr. On y trouvera, entre autres, un chapitre intitulé "News". Certains pourront, peut-être, s’étonner que l’Education nationale donne sa bénédiction au recours à des mots anglais pour essayer de mobiliser ses élèves. Cette fois encore, ils auraient bien tort, puisque le ministre concerné, M. Xavier Darcos, affirmait récemment sa volonté de faire de la France une nation bilingue (une annonce sans doute destinée, comme il est d’usage, à donner le change de la modernité, mais un objectif à l’évidence parfaitement hors d’atteinte). Ce en quoi, on l’a un peu trop oublié, il était du reste parfaitement en ligne avec son prédécesseur à ce poste, M. François Fillon, actuel Premier ministre, qui confirmait il y a trois ans, en novembre 2004, son intention d’inscrire l’apprentissage d’une langue étrangère – en fait l’anglais – dans le contenu pédagogique de l’école primaire.
Que l’on ne s’avise surtout pas de souligner l’absurdité qu’il pourrait bien y avoir à vouloir imposer l’enseignement d’une langue étrangère à des enfants trop souvent incapables de s’exprimer correctement dans leur langue maternelle (on estime qu’à la fin du cycle primaire, un bon quart des élèves ne comprennent pas grand chose, sinon pratiquement rien, à ce qu’ils lisent). Ce serait, à l’heure de l’ouverture au monde, de la mondialisation, aller contre le sens de l’histoire, faire obstacle à la modernité. Car, comme le disait en janvier 2001 un autre ancien ministre (à deux reprises) de l’Education nationale, M. Jack Lang : "Chaque enfant de ce pays est un enfant de l’Europe et un citoyen du monde". Dans cette conception, de nature purement politique, le français n’est plus, en effet, qu’un héritage du vieux monde, qu’une tradition nationale périmée qu’il convient de remiser aux oubliettes de l’histoire au profit de "l’anglais de communication internationale". Cette mise au tombeau étant prescrite, notons le, par ceux-là mêmes qui appellent sans cesse à la diversité culturelle …
Jean-Pierre Busnel
jpabusnel@wanadoo.fr