Les Québécois nont pas tous, loin sen faut, la réaction de prononcer à la
française les sigles et les acronymes quon leur lance à la tête, surtout si,
par la graphie, ils se rapprochent de mots anglais. Il suffit de penser à des
sigles comme REER (on achetait des « rirs » et non des « Réers »!) et à Magog («
Mégog »).
Depuis un an, on parle du film « Crazy », mot que lon prononce en anglais
depuis son lancement. On fait comme si le titre du film était le mot anglais
signifiant « fou ». Il est vrai quil sinspire du titre dune chanson fétiche
de lun des personnages. Mais on a dabord affaire à un titre formé de la
première lettre des prénoms Christian, Raymond, Antoine, Zacharie et Yvan.
Normalement, on devrait prononcer le sigle à la française. Mais peut-être le
poids du français est-il trop prégnant en territoire québécois? Pourquoi
faudrait-il, pour équilibrer les choses, prononcer quelques mots à langlaise?
Quoi quil en soit, cest à un tel réflexe quon reconnaît la force ou la
faiblesse dune langue.
Il est vrai quil y a ici parallélisme entre le mot anglais crazy (fou) et
lacronyme C.R.A.Z.Y. Et puis après? On peut prendre à témoin la façon de
prononcer dautres abréviations, sigles ou acronymes même sils proviennent
dune succession de mots anglais : w.c. (water closet), Ifla (International
federation of library associations) ou Unesco. En contexte francophone, ces
acronymes sont prononcés comme sils étaient des mots français.
Un redressement simpose dans le cas du film C.R.A.Z.Y. (on peut prononcer
Crasi : cest plus naturel et plus facile que « Krézé » pour un palais
francophone). Si lopération réussit, la société québécoise pourrait peut-être
accorder à loeuvre et aux artisans qui lont réalisée une citation ou un mérite
de plus, cette fois au titre de la défense et de lillustration de la langue
parlée.
Un membre de lAssociation,
Gaston BERNIER
(Le 27 mars 2006)