UN PEUPLE ET SA LANGUE – ESSAI – FERNAND COUTURIER.
édition Fondation littéraire Fleur de Lys, 484 pages.
Pourquoi un autre livre sur la situation
politique et historique du peuple du Québec?
Parce que jusqu’ici les travaux qui ont traité de ces thèmes, autant dans la
perspective fédéraliste que souverainiste, accusent une impuissance
caractérisée: ils n’exploitent pas à sa juste mesure l’argument principal qu’est
la langue. En effet, la conception de la langue qu’ils véhiculent en général,
conformément à l’interprétation courante, ne saurait justifier le nationalisme
identitaire québécois ni à l’intérieur du Canada actuel, ni comme fondant
adéquatement la souveraineté politique.
Et comment de nos jours voit-on habituellement la langue? Comme un simple
moyen ou instrument de communication: par elle on exprime ses pensées et ses
opinions et ainsi l’on peut entrer en dialogue avec les autres. Conséquence de
cette approche instrumentaliste: une langue peut être remplacée par une autre
sans graves inconvénients. Comme tout autre outil. D’autre part, les supports
techniques se raffinant, la communication instantanée entoure d’ores et déjà la
terre et prend maintenant le large du monde interplanétaire. Ce phénomène semble
demander et favoriser, par le nivellement linguistique, l’unification du monde.
Puis cela a tendance à se faire au nom des intérêts économiques voués au
développement des marchés et qui tentent de lever les obstacles que peuvent
dresser les particularités nationales et linguistiques.
Dans cette perspective et ce contexte, on peut difficilement invoquer la
diversité des langues comme argument pour défendre les identités culturelles
différentes des peuples ainsi que leur autonomie. La multiplicité des langues
apparaît plutôt comme un obstacle de taille à l’unification soi-disant
bienfaisante de l’humanité dans une communication sans entraves au service d’une
mondialisation de mouture néolibérale individualiste.
Alors ce que Un peuple et sa langue essaie de faire, c’est de montrer
que la langue comprise comme moyen, instrument ou véhicule manque l’essentiel du
phénomène langagier chez l’humain. La langue est plus que cela. En recourant à
diverses pensées philosophiques (Finkielkraut, Heidegger, Nietzsche) et quelques
expériences poétiques, on tente de laisser apparaître le langage comme l’élément
vital en lequel un peuple est ce qu’il est. Car le langage fait être. Dire, en
effet, c’est rendre manifeste, c’est faire apparaître en être. L’être est
associé au dire. Ce sont des alliés d’origine inséparables. Toutes les choses
révèlent leur essence et leurs différences dans et par le dire qui les
dévoilent. Ainsi la vérité particulière de chacune des choses relève de la
capacité évocatrice du langage, plus précisément des langages divers selon leurs
propres aptitudes à manifester. Il en va ainsi pour un peuple. Son langage
l’appelle à être. C’est en langage, voire comme langage, qu’il est et se
développe dans toutes ses particularités, qu’il accède à son identité propre.
Le peuple québécois s’est constitué et s’est développé dans sa langue, la
langue française. Autrement dit, la langue française a été et reste l’élément
essentiel ou vital de son histoire. Ainsi cette langue n’est pas pour lui un
accessoire négligeable, interchangeable, indifférent à son être de peuple. C’est
en cette langue et par elle qu’il a constitué son monde propre, c’est en
habitant cette langue que ses traits culturels particuliers se sont dessinés,
que ses idéaux démocratiques d’égalité, de liberté et de solidarité se sont
formulés et offrent un éclairage particulier pour sa vie concrète, et que son
territoire a pris les visages ou les aspects qu’il offre. à lui d’en prendre
conscience rapidement et d’agir en conséquence s’il veut envisager son propre
avenir dans cette identité. Car il y a urgence.
Aussi cette compréhension de la langue permet-elle un nouveau regard sur des
questions tout à fait d’actualité, délicates et grosses de conséquences pour le
peuple du Québec telles que la nation, les ethnies, l’immigration, l’intégration
et l’assimilation, le bilinguisme et le multiculturalisme, le jeu des
nationalismes civique, politique, territorial, ethnique et culturel, le
cosmopolitisme, la mondialisation et le thème du "citoyen du monde", etc. Cette
compréhension de la langue offre en effet une aide particulière pour exorciser
des préjugés latents, annuler des tabous qui grèvent ces questions, pour
s’affranchir ainsi de la rectitude politique qui les voilent, et ménager pour
tous un accès plus libre à la réalité. à notre réalité historique et politique
se complexifiant et s’enrichissant au fil de l’immigration de nombreuses
ethnies.
Les humains se dévoilant progressivement à eux-mêmes en langage et
laissant apparaître les choses au gré de leurs dires évocateurs, ce
langage devient l’élément ou l’aire de manifestation où se maintiennent ensemble
ou s’articulent les moments du temps, c’est-à-dire l’avenir, le passé et
le présent. Sans langage il n’y a pas d’histoire. Un peuple, le peuple du
Québec, peut et doit assumer son destin au présent, i.e. dans tout présent qui
surgit sans relâche dans l’ouverture éclairée d’un avenir projeté, projeté à
partir du tremplin de ce qu’il est devenu en rassemblant et tenant vivant dans
la mémoire du langage ce qu’il a été, ce qu’il a été dans chaque présent qui fut
sien. Développer ainsi son destin, c’est oeuvrer son histoire au présent en
lequel s’articulent toujours les dimensions temporelles de l’avenir et du passé.
Aussi Un peuple et sa langue passe-t-il en revue les moments décisifs
de l’histoire de la Province de Québec depuis la Conquête et y découvre trois
étapes dans le projet d’assimilation du fait français à l’anglais:
Assimilation expressément formulée et astucieusement poursuivie après la chute
de la Nouvelle-France; assimilation souhaitée plus ou moins secrètement et
constitutionnellement camouflée dans l’Acte de l’Amérique du Nord britannique
fondant le Canada actuel; et assimilation apparemment jugulée mais objectivement
favorisée par les politiques fédérales mises en place depuis l’ère Trudeau. Il
s’agit entre autres des lois sur le bilinguisme et le multiculturalisme, du
rapatriement unilatéral de la Constitution en 1982, du Renvoi à la Cour suprême
relativement à la sécession du Québec, de la Loi C-20 sur la clarté, de l’Union
sociale.
Pour le Québec, la position conséquente à cet état de choses est de se
placer en état de souveraineté politique. D’abord cet état s’avère tout
simplement l’achèvement de son être comme peuple, l’accession à l’émancipation
normale de la maturité, sa fin normale et légitime de peuple. Le langage
située au niveau de l’essence même du peuple semble réclamer la souveraineté
politique où se conjuguent en une remarquable union la plénitude d’être et la
liberté de parole. Site de la liberté tout court. La liberté pourrait bien
n’être que l’aire ouverte en langage pour l’exercice de nos possibilités d’être
et celles des choses de notre monde.
étant ainsi souverain, le Québec pourrait figurer pleinement et en son propre
nom à la table des Nations. Et si le désir se maintenait de s’associer avec le
reste du Canada après cette entrée dans la souveraineté, il serait alors dans la
position normale pour lui présenter un projet de vraie Confédération. Car en
situation de souveraineté il pourrait justement déléguer des pouvoirs
soigneusement définis, et être pris au sérieux. Ses propositions d’association
et de partenariat en 1980 et 1995 ne l’ont pas été parce qu’elles étaient
formulées dans une situation de non-pouvoir. Ce serait, semble-t-il bien, une
solution apte à plaire aux nationalistes fédéralistes dont l’attachement à la
réalité canadienne peut se comprendre, et capable aussi de satisfaire les
nationalistes souverainistes ou indépendantistes qui verraient enfin entre les
mains de leur propre état les pouvoirs nécessaires au plein développement du
peuple du Québec. Dans le cas d’un refus, les Québécois continueraient tout
simplement, sans les entraves d’un pouvoir étranger, à oeuvrer leur destin dans
leur langue française dont la vitalité relèverait désormais uniquement de leur
propre volonté de garder leur identité de peuple.
Cet essai est édité par la Fondation littéraire Fleur de Lys, le premier
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(Le 14 août 2004)