QUAND LES SYNDICATS S’EN MÊLENT

QUAND LES SYNDICATS S’EN MêLENT
France – Anglicisation des outils de travail, puis des esprits et des
consciences.

De Jean loup Cuisiniez
Délégué CFTC
Délégué du personnel AXA assistance

A Monsieur Alain Belais
Ministère de la Coopération et de la Francophonie
France

Bonjour,

Vous souhaitez rencontrer quelques salariés de notre entreprise, suite à
l’article paru dans le mensuel l’Expansion intitulé « Au secours ma boîte ne
parle plus français »

Axa assistance, 600 salariés, particularité du métier travailler 24h /24h.
Richesse de l’entreprise : une diversité culturelle et linguistique. Tous les
continents y sont représentés. Nous travaillons avec le monde entier.

C’est en France que le métier de l’assistance est né, ce métier avait une
langue de travail : le français. Or, peu à peu dans les entreprises , le
français disparaît comme langue de travail. La mise en place des logiciels
informatiques a accéléré le processus de son effacement, insidieux : au départ
il ne s’agit que de quelques termes… Pas de réaction, pas d’ opposition
syndicale, ni de prise de conscience des enjeux.

En 1996, lors de la mise en place de l’outil informatique, la CFTC est
intervenue immédiatement pour avoir l’abréviation française M. au lieu de MR (
abréviation anglaise).

Lorsque la Direction en 1999 a pris la décision d’installer le logiciel de
messagerie pour tous les salariés, personne ne se doutait qu’il serait en
anglais.

La seule protestation fut la nôtre, nous étions deux personnes à l’époque,
mais qui à elles seules sur un plan linguistique maîtrisent sept langues
étrangères.

Nous avons fait appel à deux textes légaux : l’ordonnance de
Villers-Cotterets et la loi Toubon et avons sollicité les conseils de l’
association « Le Droit de comprendre».

Nous avons surtout argumenté auprès de la Direction et de nos collègues les
enjeux économiques, culturels que devait impliquer l’anglicisation des outils de
travail, puis des esprits et des consciences. Petit à petit, nous avons eu des
témoignages des salariés qui souhaitaient avoir le logiciel en français mais qui
n’osaient pas le dire.

Lors des réunions avec la Direction, nous demandions en quelle langue la
réunion allait se tenir avant même de nous asseoir, refusant ainsi le fait
accompli. En effet la CFTC proposait de s’exprimer en allemand pour cette
réunion, en portugais pour la suivante, en grec, ou bien en espagnol, afin de
montrer que la Direction avait une politique réductrice ne proposant que l’
anglais comme unique langue de travail.

Cependant 6 mois plus tard, la Direction prenait la décision de tout rétablir
en français . Ce fut une prise de conscience. Depuis 1999, les logiciels sont
donc en français. Pour combien de temps ?

Certes nous avions gagné sur la langue de travail, mais d’autres combats
étaient à venir : par exemple, celui de la structure de la phrase qui était
elle-même anglaise : inversion de l’ordre des mots, le sujet devient objet.
Etait-ce sans importance?

Cela déstructurait la pensée, le français n’étant pas une langue à inversion.
C’était aussi une fatigue mentale supplémentaire, imperceptible. Nous avons
obtenu gain de cause, mais il a fallu encore se battre.

Lors d’une réunion au sein du groupe AXA, le Président a interpellé le
délégué syndical CFTC en le traitant de franchouillard parce qu’il demandait que
les comptes rendus de réunion soient en français Nous lui avons répondu par
affichage que nous étions aussi des italouillards, des hispanouillards,
sénégaloulliards, des deutschouillards et des anglouillards » …

Toujours est-il que nous constatons la disparition du français dans le monde
du travail.

Négligence, culpabilité de s’exprimer en français, lâcheté, absence de
réflexion, honte … Où sont-ils, ceux qui devraient soutenir l’espace francophone
? Qui se souvient que la première fonction donnée par Dieu à l’homme est celle
de nommer ? Que deviennent ceux qui ne savent plus nommer les choses dans leur
langue ?

Défendre l’espace francophone, c’est préserver des emplois pour les
francophones et la place de la civilisation française dans le contexte de la
mondialisation.

Aujourd’hui, ce mercredi 7 janvier 2004, le Ministère de la Francophonie a
souhaité nous rencontrer…

Dans l’attente de cette rencontre, recevez Monsieur, l’expression de nos
salutations syndicales.

Jean loup Cuisiniez
Délégué du personnel CFTC

JeanLoup.Cuisiniez@axa-assistance.com

(Le 1er février 2004)


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