Concerne: Parution du nº 3703, en avril 2004
Jai été informé que le numéro 3703 de la collection "Que sais-je?" des
éditions Presses Universitaires de France (P.U.F.) avait été dédié aux
investissements.
Or, son titre est "Investments" et il est rédigé en anglais seulement,
parce que pour les responsables des éditions P.U.F. cette initiative répondrait
à un "besoin" et inscrirait la collection dans la "modernité" -paraît-il-.
Je trouve ces explications aussi surprenantes quinsensées. En effet, il me
semble, pour commencer, que cette collection française sadresse à tout le monde
en général; je ne vois donc pas pourquoi vous vous seriez mis en tête, dun seul
coup, que la finance devait être exclusivement réservée aux seuls anglophones.
Par ailleurs, je ne pense pas que des personnes étudiant la finance en anglais
(ou nimporte quelle autre matière en anglais ou dans toute autre langue que le
français) perdent du coup, la capacité de lire le français. Si tel était le cas,
ça se saurait un peu partout, notamment dans les hôpitaux.
Bref, je trouve que votre idée aurait seulement eu du sens si ledit numéro
avait été destiné au seul marché anglo-saxon; bien que cela aurait été quelque
peu regrettable du fait de voir une publication française … filer à langlaise !
Enfin, pour ce qui est de linsertion de vos ouvrages dans la "modernité"
-autre explication présentée par les responsables des P.U.F.-, cest tout
simplement grotesque. Cest un peu comme si vous vous mettiez dans lesprit que
porter des lunettes vous permettront de vous insérer dans la bande des plus
"intelligents", à linstar de plusieurs enfants de 8 ans qui sen sont mis, eux
aussi, non pas par nécessité véritable, mais tout simplement parce quils
partagent exactement votre croyance!
Quoi quil en soi, cette affaire me paraît bien inquiétante car elle démontre
assez facilement quil existe chez vous un certain complexe dinfériorité par
rapport au monde anglophone qui devient alors forcément supérieur au
francophone, doù lassociation notable que vous faites entre "modernité" et
"anglais".
Par conséquent, il me paraît nécessaire de vous rappeler quautrefois, les
colonisés vénéraient les dominants en tant que représentants dune "civilisation
supérieure" et de vous souligner quaujourdhui, cest au nom de concepts
semblables tels la "communication", le "développement" ou encore la "modernité"
quils les vénèrent. Ils confirment donc linfériorité de leur statut et
projettent ainsi délibérément une image deux-mêmes qui est bien inférieure au
potentiel quils représentent réellement.
Le mythe hégémonique dhomogénéisation par la langue est fallacieux parce
quil suppose la supériorité des uns et rejette comme inférieure la contestation
des autres. Ce mythe fonde le racisme: qui est écarté ou sécarte du creuset
est tenu pour un être de seconde zone.
Croyez bien que je regrette de devoir protester aussi énergiquement pour des
choses qui, au bout du compte, sont élémentaires puisquelles devraient tout
simplement aller de soi. Malheureusement, le conditionnement mental dun grand
nombre de personnes est tel en ces temps-ci que le concept même du bon sens en
vient même à perdre son sens !
Adrien Borel
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(Le 27 juillet 2004)