RENTRéE DES DICTIONNAIRES
De nouveaux mots comme « téléréalité », « commerce équitable », «non-droit»,
«burqa» et « Harry Potter » font leur entrée dans l’édition 2004 du
dictionnaire Petit Larousse.
Mais petit, ce Larousse ne l’est plus vraiment puisqu’au fil du temps, cette
vénérable institution presque centenaire s’est épaissie au point d’afficher
1936 pages dans sa version «Petit Larousse illustré».
Une tendance semble se confirmer cette année: le recul des mots empruntés au
vocabulaire anglo-américain. Le patron de Larousse, Philippe Merlet, fait
même remarquer que des mots anglais qui avaient fait une entrée
spectaculaire dans la langue il y a quelques années ont été rattrapés, voire
supplantés, par leur équivalent français: il en est ainsi des couples
«software»/«logiciel» ou de «walkman»/«baladeur». Le Larousse 2004 n’est
cependant pas exempt de nouveaux anglicismes à la mode en France comme
customiser » (personnaliser) ou « people » (célébrités / vedette).
On retrouve également de très nombreux mots en rapport à l’informatique
comme : «bandeau», «configurer», «haut débit», défragmenter»,
«décompresser», «désinstallation», «raccourci clavier». Philippe Merlet
estime que ces mots informatiques restent très présents, mais sont de moins
en moins empruntés à l’anglais. Alors que l’usage du mot courriel pour les
e-mails progresse, Larousse fait entrer un autre terme québécois : pourriel,
pour les courriers électroniques, souvent publicitaires, qui sont
directement envoyés par les internautes à la poubelle.
Au chapitre des emprunts au monde francophone, on notera le «mollachu»
suisse (mou sans énergie) et son antonyme «pêchu». Le Québec a prêté son
boyau d’arrosage» et son «pourriel» ainsi que d’autres mots issus de la
réalité nord-américaine comme «galon» (ruban gradué ou s’enroulant dans un
boîtier), «gourgane» (variété de fève à gros grains) ou parcomètre
(parcmètre serait utilisé en France). La Belgique a prêté son «sonner»
(appeler au téléphone)
Du côté de la société civile, le Larousse fait rentrer les mots «burqa» (ou
«burka») [pas «bourka» ?], «homoparentalité»,«téléréalité»,
«unilatéralisme», «devoir de mémoire», «non-droit», «commerce équitable»,
«développement durable» [pas de jeux de mots sinon la brigade lexical et
historique vous enfouit sous les sarcasmes] et «principe de précaution».
Le dictionnaire admet aussi «carbone», «coparental», «home cinéma»
[cinéma-maison au Québec], «ostraciser» ainsi que «via ferrata»
Le Robert pour sa part, plus inquiet semble-t-il introduit la
«cyberguerre»et l’«anthrax», «armes de destruction massive», «fièvres
hémorragiques», «cyberguerre», «agent innervant», «bouclier antimissile»,
«état-voyou», «délinquance en col blanc», «tolérance zéro», «insécuritaire»,
«biosécurité» et «principe du pollueur-payeur».
Le Robert semble plus novateur que le Larousse, notamment dans le domaine de
la féminisation des noms de métier : le Robert 2004 admet ainsi
«chiropracteur, euse», «éboueur, euse«, «égoutier, ière» ou «maçon, onne».
Le Petit Robert 2004 de la langue française (58 euros, 2.950 pages) comprend
60.000 mots, 300.000 sens, 4.100 citations, des encadrés étymologiques de
650 mots essentiels. «La presse et les médias, mais aussi la littérature,
fournissent constamment de nouvelles manières de dire le monde qui nous
entoure», écrit le patron et «l’âme» du dictionnaire, Alain Rey.
Parmi les mots ou sens nouveaux du Petit Robert, figurent «déontologue»,
«profileur», «crumble», «wasabi», «chouchen», «cannelé» (bordelais),
«margarita», «poivrade», «apnéiste», «but en or», «sidologie» et
«gouvernance».
Les deux maisons d’édition font partie de Vivendi Universal Publishing,
société culturelle française comme son nom ne l’indique pas, acheté fin 2002
par Lagardère mais la vente n’a toujours pas reçu le feu vert de la
Commission européenne. Celle-ci doit rendre son verdict d’ici au 13 janvier
2004, à l’issue de l’enquête conduite par ses services de la concurrence.
(Ce texte diffusé le 8 septembre 2003 par M. Patrick Andries est extrait du
groupe de discussion langue-fr)