Le Québec me pue
Une nation tabou ou une nation debout ?
à Roland Giguère
« [… entretenons-nous de] celui qui ne peut pas savoir ce
que cest que
de perdre la liberté puisquil na jamais eu le courage de lexercer. »
Pierre Bourgault, Point de mire du 23 février 1971
Bien que jaime ma capitale nationale (je réside en Montérégie), je navais
pas mis les pieds dans le Vieux-Québec depuis certainement sept ou huit
ans ; et ce, essentiellement parce quà loccasion de ma dernière visite je fus
éberlué, sinon consterné (à vrai dire : presque dégoutté) de constater combien
je me retrouvais moins dans lombilic, littéralement, de la francité dAmérique
que dans nimporte quelle ville du Canada ou des états-Unis. Rien na changé,
bien au contraire. Leffondrement se poursuit.
à toutes fins utiles, on sattend à pénétrer dans le temple de la nation
québécoise. Or voilà quon nous reçoit partout avec de la musique
anglo-étatsunienne, des unifoliés bien rouges (souvent même accolés – sans
blagues ! – au US Stars
and Stripes), des english
babioles de toutes natures quon retrouverait aussi bien à New York que Toronto
(il est vrai que le quartier Petit-Champlain [quoique…] fait moins
pitoyable, si on le compare à la rue Saint-Jean intra muros), et où, en
outre, il est presque impossible de dénicher quelque chose identifié « Québec »
(ou qui soit fleurdelysé en quelque manière) sans quon y voit associé
de facto : ou « Canada », ou un symbole emblématique de celui-ci… Comme si,
sur le site propre de la fondation de la grande Cité française par Samuel de
Champlain, en 1608, la lexie Québec était devenue rien moins que tabou,
ou – dans le meilleur des cas !? – tout à fait incapable de se tenir debout,
toute seule, en absence du soutien du Federal State of Canada.
Le Vieux-Québec, désormais site privilégié de lexpression de la propagande
canadienne… ?
Comme si… – dOsaka, Los Angeles ou Madrid – les étrangers parcouraient des
cinq, huit ou douze mille kilomètres pour se voir assommés dangloaméricanités à
pleines vitrines au coeur du seul état français du continent… Il ne me vient
quun mot à lesprit : RéPUGNANT. Répugnant et servile, en effet, que de se «
déliquescer » soi-même de la sorte. Quarante ans après la Révolution tranquille,
plus dun quart de siècle suivant ladoption de la Charte de la Langue
française, ultérieurement enfin à un référendum sur lIndépendance à trois
poussières du pays-pas-encore, eh bien il faut (r)établir ce constat, net : nous
sommes aussi colonisés – Nous, Québécois – que nous pouvions lêtre il y a
cinquante ans. Et plus…
Le drame de notre temps, voire la tragédie, cest quà lépoque nous en
étions conscients.
Une fois de plus, hélas ! Gilles Vigneault na pas tort : « Les humains
étant les animaux les plus aptes à sadapter à tout, il nest pas étonnant de
les voir trouver parfois leur bonheur dans leurs chaînes… Et les convaincre
alors de liberté représente une tâche ardue qui peut aller jusquà sembler
absurde. » (in livret du coffret audio-numérique double – et
magnifique : « Au doux milieu de vous »). Presque deux cents ans plus
tard, nous restons toujours, et notablement, en deça des nobles imprécations du
grand Hegel (Encyclopédie, § 442, rem.) : « Sich zu sich selbst zu
befreien » (se libérer pour être soi-même).
Bref, devant pareille démission collective (le bilinguisme de moins en moins
larvé au sein de la société québécoise – entendons : de plus en plus explicite,
arrogant et sans gêne – en témoigne déjà largement), jhésite entre le felquisme
revisité et les larmes courroucées des Cowboys fringants :
« Si cest ça le Québec moderne
Moi jmets mon drapeau en berne. »
étienne LaHire
LaHire@Q-bec.com
Saint-Denis s/Richelieu, le 21 août 2003
Note – . Linternaute désirant formuler à son tour quelque doléances pourra
pour ce faire sadresser aux instances suivantes : La ville de Québec (Renseignements@Ville.Quebec.Qc.ca
et/ou LaCite@Ville.Quebec.Qc.ca),
le périodique dinformation : Ma Ville (Souad.Lyahiaoui@Ville.Quebec.Qc.ca),
le Bureau dinformation touristique (BIT@CUQ.Qc.ca),
les magazines Québec-Scope (Quebec-Scope@Qc.Aira.com)
et Voilà Québec (Redaction@VoilaQuebec.com
et/ou Editeur@VoilaQuebec.com).