LE FRANçAIS MENACé AU TRAVAIL
Québec – Les travailleurs immigrants du Québec affirment utiliser le plus
souvent l’anglais.
Le français demeure menacé au travail
Plus de 25 ans après l’adoption de la loi 101, le français n’est toujours pas
la langue de travail au Québec.
La pression exercée par la langue anglaise dans les milieux de travail du
Québec fait en sorte que le français n’y est pas encore la langue commune,
déplore l’Office québécois de la langue française.
Dans son rapport annuel de gestion, qui vient d’être déposé à l’Assemblée
nationale, la présidente de l’Office, Nicole René, note que 47 pour cent des
travailleurs immigrants du Québec affirment utiliser le plus souvent l’anglais
au travail.
De plus, 52 pour cent des travailleurs francophones de la région de Montréal
sont tenus d’utiliser l’anglais au travail, dont 16 pour cent pendant la
majorité du temps, indiquent les données du recensement de 2001 mises en
évidence par Mme René.
«Ces données traduisent une situation qui peut devenir préoccupante, note la
présidente de l’Office, surtout dans un contexte d’ouverture des marchés, si on
ne se donne pas les moyens d’assurer aux Québécois le droit de travailler en
français».
Quarante-sept pour cent des travailleurs immigrants du Québec affirment
utiliser le plus souvent l’anglais au travail.
Le mois dernier, le chercheur Pierre Serré avait lui aussi établi, à partir
des données toutes récentes du recensement fédéral de 2001, que la langue
française dans les milieux de travail québécois était menacée, en dépit des
exigences de la Charte de la langue française, la célèbre loi 101, qui fait du
français la langue de travail au Québec.
L’organisme note d’ailleurs que la francisation des entreprises requise par
la loi demeure problématique.
Par exemple, dans les grandes entreprises québécoises à vocation
internationale, même si le français est la langue de travail dans la majorité
des entreprises, «l’anglais exerce une forte pression attribuable au recrutement
d’une main-d’oeuvre spécialisée provenant de l’extérieur du Québec».
De plus, ces entreprises «recourent à de l’équipement ou à des technologies
provenant des pays anglophones, ainsi qu’à une clientèle et à des fournisseurs
non québécois, qui imposent plus ou moins directement leurs exigences de
l’anglais».
L’Office rappelle qu’une multinationale peut pourtant respecter la langue
française, comme le prouve le prix remis en 2003 à la compagnie Sony pour son
assistant numérique CLIE, publié en français.
Par contre, les comités de francisation mis en place dans les grandes
entreprises, et qui regroupent la direction et le syndicat des employés, n’ont
été actifs que dans 18,8 pour cent des cas. «Il y a un important travail à faire
pour réactiver ces comités et susciter la participation de leurs membres», note
le rapport de l’Office.
L’Office a reçu cette année 3525 plaintes pour des transgressions à la loi
101 ou aux règlements, soit à peu près le même nombre de plaintes que l’année
précédente, où il y en avait eu 3437.
L’organisme tente toujours de corriger l’infraction par un contact avec
l’entreprise fautive, aux fins notamment de raccourcir les délais. En 2002, 93
pour cent des corrections ont pu être apportées sans que l’Office n’ait eu
besoin de s’adresser aux tribunaux.
Enfin, la présidente note que l’Office manque de fonds pour assumer tous les
mandats qui lui sont confiés.
Par exemple, l’organisme a dû limiter son service d’assistance terminologique
par Internet aux seuls journalistes, faute de fonds suffisants. Le service était
autrefois disponible au grand public.
Le gouvernement Charest n’a pas encore compris le message, semble-t-il. Les
derniers crédits déposés en mars dernier par le ministre des Finances fixent
pour l’année 2003-2004 le budget de l’Office à 17,8 millions $, soit 312 000 $
de moins que l’année précédente.
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Ce texte de M. Norman Delisle de la Presse canadienne (PC) nous a été communiqué
par M. Luk Arbuckle [ larbuckl@uoguelph.ca
] le 5 novembre 2003.