LES FRANCOPHONES HORS QUéBEC
Le déclin démographique
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Les modifications à la Charte n’ont pas freiné le déclin
Marc Thibodeau
La Presse
LES DISPOSITIONS de la Charte des droits et libertés qui garantissent les
droits linguistiques des minorités n’ont pas permis de freiner le déclin
relatif de la population de langue maternelle française des provinces
anglophones, qui se poursuit depuis 50 ans.
En 1951, les personnes vivant à l’extérieur du Québec qui déclaraient le
français comme langue maternelle comptaient pour 7,25% de la population. Ils
n’en formaient plus que 4,25% en 1996, en dépit des modifications juridiques
apportées au début des années quatre-vingt, indique une nouvelle étude
dévoilée hier par la Commissaire aux langues officielles, Dyane Adam.
Au Nouveau-Brunswick, la communauté de langue maternelle française formait
33,2% de la population en 1996, mais le chiffre correspondant était
inférieur à 5% pour toutes les autres provinces à majorité anglophone,
atteignant un plancher de 0,4% à Terre-Neuve.
Selon l’étude en question, qui traite plus spécifiquement de la situation
de
l’éducation en milieu minoritaire francophone, le nombre de personnes dont
le français est la langue maternelle a en fait augmenté durant la période de
50 ans considérée, mais la hausse observée dans ces communautés était moins
marquée que celle de l’ensemble de la population.
L’immigration a notamment contribué au déclin relatif des minorités
francophones puisque la part des nouveaux arrivants s’établissant au Canada
anglais qui ont le français comme langue maternelle est en recul depuis près
de 30 ans.
La migration interprovinciale, qui favorisait les communautés francophones
hors-Québec avant 1986, se serait renversée par la suite en les privant du
coup de milliers de personnes.
L’auteur de l’étude, Angéline Martel, professeur à la Télé-université du
Québec, note que ces statistiques démolinguistiques «décrivent une situation
qui n’est guère encourageante en ce qui concerne le développement des
communautés francophones et acadiennes dans les provinces à majorité
anglophone».
Les modifications apportées à l’article 23 de la Charte pour assurer le
droit d’instruction dans la langue de la minorité viennent «trop timidement
encore infirmer cette situation», ajoute la chercheure.
Cette conclusion s’inspire notamment du fait que la part de l’effectif
scolaire admissible qui obtient l’enseignement dans la langue de la minorité
a crû de façon «limitée» de 45% à 54%, entre 1986 et 1996.
Tant Mme Martel que Mme Adam pressent les gouvernements provinciaux de
mettre en oeuvre un plan d’action élaboré de manière à faire en sorte que
75% de «l’effectif scolaire cible» soit inscrit dans les écoles françaises
des provinces à majorité anglophone d’ici 10 ans.
La Commissaire aux langues officielles estime que l’article 23 tarde à faire
sentir pleinement ses effets dans ses provinces parce que les gouvernements
n’ont pas voulu d’emblée «honorer leurs engagements et leurs
responsabilités».
Les batailles juridiques entreprises par les minorités en réaction à ces
réticences ont laissé beaucoup de «séquelles», constate Mme Adam, qui
invite
tous les acteurs concernés à travailler de concert pour attirer plus
d’élèves dans les écoles francophones. «Des mesures énergiques
s’imposent»,
dit-elle.
L’immigration constitue une autre façon de soutenir le développement des
communautés minoritaires francophones, note la commissaire, qui presse le
gouvernement fédéral de tenir compte de ces besoins dans ses politiques.
«Leur vitalité en dépend», note-t-elle.
(Ce texte nous a été communiqué par notre correspondant M. Daniel A.
Duclos
Gatineau, Qc)
(Le 17 avril 2001)