MONTFORT ENGAGé DANS UNE CAUSE
HISTORIQUE
Le symbole national de détermination francophone
qu’est devenu l’Hôpital Montfort a grandi encore plus au cours d’une année où
l’incertitude a continué de planer sur l’avenir de notre institution et des services de
santé en français pour la communauté franco-ontarienne de la région et de toute la
province.
Après avoir épuisé tous les moyens de négociations
possibles et raisonnables, le 27 juillet, dans un geste d’une portée historique, le
Conseil d’administration de l’Hôpital Montfort a décidé d’intenter un recours en
justice pour faire annuler les directives de la Commission de restructuration des services
de santé de l’Ontario touchant le démantèlement des services de Montfort.
Le requête en révision judiciaire préparée par Me
Ronald Caza, au nom de Mme Michelle de Courville Nicol, Présidente du Conseil
d’administration de Montfort, Mme Gisèle Lalonde, Présidente de S.O.S. Montfort, et
l’Hôpital Montfort, a été déposée en Cour divisionnaire de l’Ontario trois jours plus
tard, le 30 juillet.
La décision de demander l’aide des tribunaux n’a pas
été prise à la légère par le Conseil d’administration. En fait, l’avocat de Montfort
dans cette cause, Me Caza, a lui-même accepté de poser un geste sans précédent en
soumettant son argumentation à un groupe de juristes et constitutionnalistes avant que le
Conseil d’administration n’ait à prendre sa décision. Les juristes présents ont été
unanimes à conclure que Montfort se devait d’intenter le recours en justice, et le plus
vite possible.
L’importance d’agir était devenue d’autant plus urgente
que l’Hôpital connaissait de plus en plus de problèmes à l’interne, occasionnés par la
perte de personnel médical et une démoralisation générale, et que nous risquions de
subir des torts irréparables. Le personnel de Montfort continuait de faire preuve d’une
loyauté et d’un engagement exceptionnels. Mais, une déclaration malheureuse du
président de la Commission, le dr Duncan Sinclair, rapportée dans "Le
Droit" du 4 juillet, à l’effet que la Commission n’avait "jamais
négocié" avec Montfort, avait semé un désarroi qui grandissait de jour en jour.
Cette déclaration suivait de près la controverse entourant l’embauche de M. David Levine
comme directeur général de l’Hôpital d’Ottawa.
Le Conseil d’administration s’était engagé, dès le mois
de septembre à utiliser la voie légale aussitôt qu’il deviendrait évident que l’avenir
de l’Hôpital était ainsi menacé. Cette intention avait été renouvelée et renforcée
par un autre vote du Conseil en février 1998.
Vers la fin de juin, il devint évident que la situation
interne menaçait de se détériorer à un point tel que l’Hôpital ferait face à une
crise majeure en l’espace de quelques semaines. Les gestionnaires de l’Hôpital, dont le
médecin en chef, le dr John Joanisse et le président du Conseil des médecins, le dr
Brendan Quinn, recommandaient alors unanimement un recours immédiat aux tribunaux.
Le Conseil d’administration, par un vote de 8-6, décidait
cependant de tenter une ultime tentative pour trouver une solution devant une ouverture
manifestée par des représentants de l’Hôpital d’Ottawa. Au terme d’une rencontre à cet
effet avec l’exécutif de l’Hôpital d’Ottawa et d’une rencontre subséquente entre son
directeur général, M. David Levine, le p.-d.g. de Montfort, M. Gérald Savoie, et le
doyen de la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa, il en ressortait que
l’Hôpital d’Ottawa pourrait étudier la possibilité de céder une cinquantaine de lits
de soins aigus à Montfort, à contrat.
C’est dire donc que Montfort accepterait de transférer
ses lits de médecine familiale, de médecine et de chirurgie, tel que l’exigent les
directives de la Commission et que, par la suite, une partie de ces lits lui seraient
alloués par l’Hôpital d’Ottawa d’après un contrat de service. La durée de ce contrat
restait à préciser, quoique les chiffres de cinq et dix ans aient été mentionnés.
De même, la proposition de l’Hôpital d’Ottawa exigeait
d’abord qu’elle soit acceptée dans par le groupe de ses planificateurs, puis par le
Conseil d’administration et, enfin, qu’elle soit soumise à la Commission de
restructuration pour approbation finale. L’Hôpital d’Ottawa s’engageait aussi à appuyer
Montfort dans sa revendication d’un plein service d’urgence, mais, encore là, la
décision finale revenait à la Commission.
Par ailleurs, la Commission maintenait de son côté
qu’elle n’avait nullement l’intention de changer les directives émises le 13 août,
malgré dix mois de pourparlers pour trouver une solution raisonnable. Sur la question de
l’urgence en particulier, la Commission soutenait en plus que c’était maintenant au
ministère de la Santé de déterminer quelle genre d’urgence aurait Montfort avec son "urgent
care", tel que définit dans le rapport final du 13 août. Quant à la question
de lits de soins aigus additionnels, la Commission demandait à Montfort de négocier avec
l’Hôpital d’Ottawa, après quoi, les propositions qui ressortiraient de cette
planification seraient examinées.
Face à
- la menace très réelle de détérioration interne,
- l’intransigeance de la Commission face à ses directives
malgré dix mois de pourparlers,
- la durée prévisible de négociations encore embryonnaires
avec l’Hôpital d’Ottawa,
- le degré d’incertitude élevé associé à cette nouvelle
négociation,
- l’extrême réticence de Montfort d’accepter des lits à
contrat (avec la possibilité que le contrat soit annulé d’ici quelques années), et
- la recommandation unanime du comité de juristes,
le Conseil d’administration de Montfort n’avait plus
d’autre choix que d’opter pour la voie légale.
Sinon, Montfort risquait de perdre l’une des plus grandes
luttes jamais entreprises par la communauté franco-ontarienne par défaut, embourbé dans
le marasme de négociations qui ne semblaient jamais avancer.
Comme le disait Mme de Courville Nicol à la conférence
de presse du 28 juillet, annonçant la décision de recourir aux tribunaux, l’Hôpital
Montfort n’allait pas laisser tomber la communauté qui s’était portée aussi
spontanément et massivement à sa défense. Le sort de Montfort était indissociable de
la communauté franco-ontarienne et de ses droits.