TEXTE PRéPARé à LA SOCIéTé SAINT-JEAN-BAPTISTE DE MONTRéAL ET SIGNé PAR DES
MILITANTS SOUVERAINISTES à LA SUITE DU RéCENT AVIS DE LA COUR SUPRêME
(English version soon available – La versión española esterá disponible
dentro de poco)
Message aux démocrates de tous les pays
DEMAIN, SI NOUS LE VOULONS
Au Canada, un conflit fondamental nourrit une crise politique interminable : celui qui
oppose deux peuples, dont l’un tire le plus clair de ses origines de la France et l’autre
des îles Britanniques.
Ce conflit fait du Canada une entreprise de subordination d’un peuple à l’autre.
Celle-ci prend sa source dans une défaite militaire au XVIIIe siècle et s’inscrit dans
une structure politique qui, depuis l’Union imposée par Londres en 1840 (sur les modèles
de l’Union avec l’écosse de 1707 et avec l’Irlande de 1800), puis le régime de 1867,
faussement appelé "Confédération", a donné au Canada anglais les moyens
d’accroître sa supériorité démographique, d’étendre son territoire et d’additionner
de nouvelles provinces, plaçant ainsi le Québec sous tutelle politique, et les
Québécois dans un incessant processus de minorisation. Voici peu d’années encore, en
1982, cette subordination est apparue avec force quand le Canada a imposé au Québec une
constitution que ni son Assemblée nationale, ni son peuple n’ont acceptée.
Et c’est bien parce que le Canada est une structure de domination qu’un nombre
grandissant de Québécois ont résolu d’en sortir. Cette détermination se manifeste plus
clairement depuis 1960, sous l’action de plusieurs facteurs propres au Québec et sous
l’inspiration exemplaire du vaste mouvement de décolonisation du Tiers Monde — et plus
récemment des peuples de l’Est de l’Europe. Cette aspiration n’a cessé de se répandre
dans les coeurs et les esprits et de s’exprimer dans les urnes : 24% en 1970, 40% en 1980,
49,4% au référendum du 30 octobre 1995.
La Cour suprême, tribunal national du Canada
Ce système de domination n’exclut pas le recours aux menaces, à l’intimidation et à
la force.
Mais, pour l’essentiel, il s’appuie sur l’écrasante supériorité démographique et la
puissance économique du Canada anglais, qui assure à celui-ci l’emprise sur dix des onze
parlements, gouvernements et administrations, et lui donne le contrôle des grands moyens
de communication et des appareils médiatiques.
Dans cette panoplie, une place de choix est occupée par les tribunaux, au sommet
desquels trône la Cour suprême du Canada, qui vient tout juste de rendre, à la demande
expresse du gouvernement d’Ottawa, un avis juridique que certains cherchent déjà à
opposer à nos légitimes aspirations nationales.
Ce tribunal n’est pas de type fédéral, encore moins de type binational : c’est le
tribunal national du Canada (c’est ainsi du reste qu’il se qualifie lui-même). C’est
Ottawa seul qui l’a créé en 1875. C’est le premier ministre du Canada qui en choisit
seul les juges. C’est le parlement fédéral qui en règle seul le mode de fonctionnement.
Enfin, c’est Ottawa, avec ses provinces anglaises, qui, en 1982, à la faveur d’une
nouvelle constitution, imposée unilatéralement au Québec, lui a taillé un rôle de
premier plan dans la défense et la promotion de "l’unité canadienne".
Et il le fait bien : ce sont ses avis rendus en 1981-1982 sur notre droit de veto qui
ont permis au Canada d’adopter une nouvelle constitution malgré le refus du Québec.
Un trou noir
Dans son désarroi postréférendaire d’octobre 1995, c’est tout naturellement vers ce
tribunal que le Canada s’est tourné. Aux questions posées, les juges ont donné les
réponses qu’attendait Ottawa : "Non! le droit canadien ne permet pas la proclamation
de l’indépendance par le Québec! Non! le droit international ne prévoit pas de cas
semblable à celui du Québec, qui n’est pas une colonie au sens classique du terme!"
Ces réponses, aussi sèches qu’inacceptables, constituent une triple négation : de
notre qualité de peuple, de l’état de subordination organique dans laquelle nous nous
trouvons et, plus grave encore, de notre droit à l’autodétermination.
En venant conforter les bonnes consciences du Canada anglais, cet avis stimulera contre
nous les ardeurs d’Ottawa. Déjà, on s’en donne à coeur joie au gouvernement et dans
certains milieux, et c’est à qui maintenant proposera le meilleur moyen de s’ingérer
dans nos affaires : jouer sur la formulation de la question? contrôler le dépouillement
des votes? exiger une majorité inouïe?… Cet avis est construit pour accroître les
difficultés, créer des embûches, briser nos volontés. Certes, il y aura, au bout de
cette nouvelle et difficile course à obstacles, une obligation, pour le Canada anglais,
de négocier. Cela n’est pas rien, mais les ténors du fédéralisme s’empresseront d’en
amoindrir l’importance.
Les politiciens retors et les esprits controuvés ont donc encore de beaux jours devant
eux. En tout état de cause, la Cour suprême est là, qui n’a pas dit son dernier mot sur
ce trou béant qu’elle vient sciemment de creuser, et d’où sortiront bien de nouvelles
couleuvres que certains tenteront de nous faire avaler. Puissent nos dirigeants en tenir
compte.
Le droit d’être Québécois
Au risque d’affaiblir son efficacité, une cour de justice doit respecter les
apparences — et plus encore les évidences.
Or une chose crève les yeux : la légitimité de notre combat, qui s’appuie sur quatre
siècles et qui est porté par un nombre sans cesse grandissant de Québécois. Du reste,
un très large consensus existe au Québec sur le droit du peuple québécois à décider
lui-même, sans ingérence, de son avenir.
Voici qu’une cour qui n’est pas la nôtre, une cour canadienne vient de constater cette
évidence québécoise. Nous n’avions pas besoin d’elle pour nous le dire. Mais puisque
c’est leur cour et que ce qu’elle dit est capital, disons au Canada et à son gouvernement
: "Notre cause est légitime. Cessez alors d’en dénaturer le sens, d’en caricaturer
les mobiles, d’en démoniser les chefs : ce sont des patriotes, c’est-à-dire des hommes
et des femmes qui aiment leur patrie et entendent en faire un pays".
Et si notre cause est légitime aux yeux mêmes des juges d’Ottawa, vous avez, citoyens
et démocrates de tous les pays, notamment vous du Canada anglais, le droit de lui
apporter votre soutien et votre amitié. Oui, tout le monde, et au premier chef tous ceux
et celles qui, Autochtones installés ici depuis des temps immémoriaux, anglophones de
souche ou nouveaux citoyens venus récemment des pays souvent les plus lointains, vivent
aujourd’hui parmi nous, et qui ont maintenant l’assurance que plus personne n’a le droit
de les menacer de la terrible accusation de "traîtres au Canada", et qu’ils
peuvent dès lors, en toute liberté, donner leur adhésion au Québec.
Oui, tous ceux et celles qui vivent et votent au Québec savent qu’ils ont le droit
d’être Québécois, et de l’être pleinement.
Au cours de cette longue résistance que nous avons toujours opposée à ceux qui
voulaient nous dominer, nous avons appris que rien n’est facile. Les juges d’Ottawa vont
maintenant rendre à leurs politiciens le relais que ceux-ci leur ont un moment confié.
D’eux, nous n’avons rien à attendre. Ce qui nous viendra, nous viendra de nous-mêmes, de
notre détermination, de ce OUI que nous nous donnerons ensemble, le jour où nous le
déciderons et selon la manière que nous seuls déciderons, pour enfin sortir de ce
système de subordination qui s’appelle le Canada, et hisser le Québec au rang de pays
libre et souverain, membre à part entière de l’Organisation des Nations unies. Bientôt,
car le temps presse.
Montréal, le 28 août 1998
UN COLLECTIF DE MILITANTS
SOUVERAINISTES :
Magella ARCHIBALD, SNQ Saguenay-Lac-St-Jean
René ASSELIN, SSJBM
André AUCLAIR, écrivain
Maxime BARAKAT, médecin
Pierre BEAUCAGE, SSJBM
Yves BEAUCHEMIN, écrivain
Mario BEAULIEU, éducateur
Jacques BELLEMARE, avocat
Gaston BERGERON, SSJBM
Denise BOUCHER, poète
Guy BOUTHILLIER, SSJBM
Jean-Paul CHAMPAGNE, SSJBM
Pierre M. CHAPUT, administrateur
édouard CLOUTIER, politologue
Salomon COHEN, administrateur
Robert COMEAU, historien
Pascale CONSTANT, SNQ Richelieu/St-Laurent
Jean-Marie COSSETTE, SSJBM
Michel CôTé, SSJBM
Sophie CUNNINGHAM, SSJBM
Pierre DE BELLEFEUILLE, ancien député
Jean-Luc DION, ingénieur IPSO
Roger DIONNE, SSJBM
Pierre DUBUC, l’Aut’ Journal
Bernard FRAPPIER, vigile
Raôul DUGUAY, poète
Jacqueline DUGAS, écrivain
André DUPONT, traducteur
Pierre FALARDEAU, cinéaste
Lucie FAVREAU, association des internautes souverainistes
Marc-André FORCIER, cinéaste
Jean GAGNON, réalisateur radio
Richard GERVAIS, philosophe, IPSO
Pierre GRAVELINE, éditeur
Suzan GRAVEL, enseignante
Marcel HENRY, SSJBM
Juan Jose HERNANDEZ, commissaire CSIM
Henri JOLI-COEUR, administrateur
Jean LAPOINTE, IPSO
Louis LA ROCHELLE , administrateur
Germain LAVALLéE, SSJB Richelieu-Yamaska
France LAVERDIèRE, SNQ Laurentides
Gordon LEFEBVRE, politologue
Jean-Marc LéGER, conseiller en relations internationales
François LEMIEUX, SSJBM
Mathieu MARCHAND, SSJBM
Yves MICHAUD, journaliste
Denis MONIèRE, politologue
François MORIN chercheur
Jean-François NADEAU, éditeur
Robert NADEAU, philosophe
Ercilia PALACIO, professeur
Hélène PELLETIER-BAILLARGEON, écrivain
John PHILPOT, avocat
Robin PHILPOT, traducteur
Mariette PRINCE, SSJBM
Paul-André QUINTIN, professeur
Jean-Guy PLANTE, SSJBM
François REBELLO, étudiant
Michel RIOUX, L’Action Nationale
Michèle ROSSIGNOL, comédienne
Bruno ROY, écrivain
Yves SABOURIN, SSJBM
Thibaud SALLE, IPSO
Christian SINAVE, médecin ISPO
Jacques SOULIèRES , SNQ de l’Outaouais
Denis SYLVAIN, SSJBM
Victor TEBOUL, enseignant
Pierre VADEBONCOEUR, écrivain
Guillaume VAILLANCOURT, commissaire CSM
André VANASSE, Bloc québécois Drummond
* Pour apporter son soutien : Tél : (514) 843-8851
Téléc : (514) 844-6369
Courriel : ssjb@cam.org