Personne morale constituée en 1986 sous le nom de Association des usagers de la langue française, en vertu de la IIIe partie de la Loi sur les compagnies (chap. C-38)
Fondateur et président honoraire : Robert Auclair
Je vous invite fortement à prendre connaissance de l’envoi ci-joint qui concerne le traitement insatisfaisant, pour ne pas dire plus, d’une plainte par l’OQLF.
N’hésitez pas à intervenir personnellement si vous le pouvez. Sa Majesté la langue française vous en sera éternellement reconnaissante.
Québec, le 1er mai 2014
Le Commissaire à la qualité des services
Office québécois de la langue française
Édifice Camille-Laurin
125, rue Sherbrooke Ouest
Montréal H2X 1X4
Objet : Plainte contre la Ville de Laval
Madame ou Monsieur le Commissaire,
Vous êtes en fonction, paraît-il, depuis juin 2013 et votre rôle serait de répondre aux citoyens qui ne sont pas satisfaits de la façon dont l’Office québécois de la langue française (OQLF) traite leurs interventions. Nous vous adressons donc la présente à partir de l’information ci-dessus. Si elle n’est pas exacte, veuillez nous excuser. Vous seriez bien aimable de nous renseigner.
L’Asulf a fait plusieurs démarches à partir de février 2012 contre l’appellation fautive Place Bell pour désigner l’amphithéâtre municipal projeté par cette ville. Elle s’est adressée au Premier ministre, à la Première ministre, aux maires successifs de la Ville de Laval, à la société Bell Canada et à Evenko, ces deux dernières étant engagées dans ce projet. Ses démarches n’ayant rien donné, elle a porté plainte à l’OQLF.
Voici le cheminement de cette plainte :
Plainte le 11 juillet 2012 – Accusé de réception le 26 suivant de la Direction du traitement des plaintes dans une lettre ne comportant aucun nom ni aucune signature.
Rappel le 12 octobre 2012 – Pas de réponse
Lettre à la présidente de l’Office le 18 décembre 2012 – Pas de réponse.
Lettre de rappel le 20 février 2013 à la Direction du Service du traitement des plaintes – Accusé de réception dans une lettre de la Direction des enquêtes de l’Office du 26 février 2013 ne comportant aucun nom ni aucune signature.
Courriel de la Direction des relations avec l’Administration de l’Office le 7 mars suivant expliquant que la plainte suit son cours et qu’elle est traitée sérieusement comme « chacune des milliers de plaintes que nous recevons chaque année ».
Autre courriel de la Direction des relations avec l’Administration de l’Office le 8 avril 2013 :
Dans la situation faisant l’objet de votre plainte, l’utilisation du terme Place constitue effectivement une impropriété.
En conséquence, nous sommes intervenus auprès de la direction de la Ville de Laval pour l’informer de la non-conformité de la dénomination projetée et lui suggérer des pistes de solution pour le choix d’une dénomination plus appropriée. Cette démarche nous mène à procéder à la fermeture de ce dossier.
L’Asulf adresse à la Direction des relations avec l’Administration le 15 avril 2013 la lettre suivante pour protester contre cette réponse étonnante.
Madame ou Monsieur inconnus,
Je ne peux m’empêcher de mentionner de nouveau que votre pratique de l’anonymat dans votre correspondance est frustrante pour vos correspondants. Est-ce une façon de procéder conforme au bon usage en français?
Je note que vous avez suggéré à la ville de Laval des pistes pour le choix d’une dénomination plus appropriée pour désigner la Place Bell, sans mentionner si vous avez eu une réponse. De plus, votre communication se termine par la phrase suivante : « Cette démarche nous mène à procéder à la fermeture de ce dossier ». Cette dernière phrase m’a estomaqué. Je n’en crois pas mes yeux.
L’Asulf n’a pas porté plainte pour que l’Office fasse des suggestions à la Ville quant au choix d’une appellation sans demander si ces suggestions sont acceptées ou non. Notre association s’est adressée à votre organisme pour qu’il voie à l’application de la Charte de la langue française. En clair, cela veut dire que l’Office, après avoir fait au préalable des suggestions, s’il le juge à propos, informe la Ville que le mot place a été normalisé en 1980 et qu’il ne peut servir à désigner un bâtiment.
L’Office doit ajouter que l’Administration, ce qui comprend la ville de Laval, doit, en vertu de la Charte, se conformer à cette normalisation. Elle doit choisir un autre mot que place pour désigner l’ensemble appelé actuellement Place Bell. À défaut par la Ville de se conformer à cet ordre, l’Office doit informer cette dernière qu’il se prévaudra des dispositions prévues dans la loi pour faire respecter la normalisation applicable dans ce cas.
Il ressort de ce qui précède qu’il est impensable, c’est le moins qu’on puisse dire, de fermer le dossier sans savoir ce que la Ville a décidé. Au contraire, l’Office doit accorder une priorité au traitement de ce dossier très important et s’assurer de l’application de la Charte. Il doit revoir sa décision dans le sens exposé dans la présente. Notre association ne peut abandonner ce dossier.
Pas de réponse à cette lettre.
L’Asulf écrit au président-directeur général par intérim le 24 mai 2013. Pas de réponse.
L’Asulf lui récrit le 25 juin 2013 – Pas de réponse.
L’Asulf écrit à la Direction des relations avec l’Administration le 23 août 2013. Pas de réponse.
L’Asulf écrit à la Direction des relations avec l’Administration le 23 octobre 2013. Cette fois, l’association reçoit une réponse datée du 5 décembre 2013 et ne comportant aucun nom ni aucune signature. Elle consiste dans les deux alinéas qui suivent :
Depuis des décennies, l’Office québécois de la langue française veille à ce que le français soit la langue normale et habituelle du travail, des communications, du commerce et des affaires. Dans le cadre des activités de l’Office visant le respect de la Charte de la langue française, les plaintes constituent une excellente source d’information. Nous vous remercions d’avoir porté à notre attention l’utilisation de la dénomination Place Bell, par la Ville de Laval et ses partenaires, pour désigner un futur complexe sportif.
À l’Office, le traitement des plaintes est un processus formel qui repose sur des renseignements confidentiels impliquant de tierces parties. En conséquence, nous ne divulguons pas les détails concernant ces plaintes et leur traitement à qui que ce soit, y compris aux plaignants, comme le prévoit la Politique de suivi auprès des plaignantes et des plaignants. Pour plus d’informations à ce sujet, visitez notre site web ou communiquez avec les renseignements généraux de l’Office au 514 873-6565.
La formule-type ci-dessus de l’Office ne répond nullement à la lettre précédente de l’Asulf. Elle ne traite nullement de la plainte comme telle. Bref, ce n’est pas une réponse.
L’Asulf constate en avril 2014 que l’appellation Place Bell est toujours employée dans les médias, qu’elle est encore affichée, que l’Office a fermé le dossier et que rien n’indique que cette faute de français va être corrigée.
L’Asulf demande le respect de la Charte, soit l’emploi d’une appellation correcte pour l’amphithéâtre projeté par la Ville de Laval, qui écarte en particulier le mot place, vu que ce mot a été normalisé par l’Office en 1980 (art. 118). À noter que cette ville fait partie de l’Administration selon l’annexe de la Charte de la langue française.
C’est l’obligation légale de l’Office de faire appliquer la Charte. Il ne peut se contenter de faire des suggestions d’ordre linguistique comme n’importe lequel premier venu. Il peut encore moins fermer le dossier sans s’être assuré que la Ville va se conformer à la Charte. C’est le comble!
Cet organisme doit mettre la Ville en demeure de choisir une appellation qui écarte le mot place et, à défaut par cette dernière de se conformer à cet ordre dans le délai donné, déférer le dossier au procureur général conformément à l’art. 177 de la Charte.
En outre, en vertu de l’art. 169 de cette même loi, l’Office doit informer la plaignante du sort fait à sa plainte. L’Asulf présume que cette dernière est refusée puisque le mot place est toujours employé fautivement et que personne ne l’a informée qu’il était abandonné, ou qu’il le serait.
Espérant que vous verrez à ce que l’OQLF fasse corriger dans les meilleurs délais cette situation intolérable, pour ne pas dire plus, qui constitue une violation flagrante de la Charte de la langue française, nous vous prions de croire, Madame ou Monsieur le Commissaire, à nos salutations distinguées.
RA/ac
Robert AUCLAIR