Une agitation que l’on qualifie de crise peut bien donner le change. En réalité, le Québec rebrasse toujours le même jeu avec des irruptions et des assoupissements. Une insatisfaction, qui ne va jamais à sa cause, confère à toutes nos démarches un caractère d’acte manqué. On décrit la situation présente comme un affrontement entre la jeunesse et un pouvoir qui a partie liée avec le capital anglo-américain et un certain ordre mondial. Face à la complexité des facteurs historiques, politiques, économiques et sociaux, la rue apparaît comme un raccourci magique et même une diversion qui emprunte au concert rock et aux techniques populistes. Chose certaine, le tintamarre excède de beaucoup le contenu réel et la visée des revendications, d’où une certaine lassitude et une impression du déjà trop vu.
De tout temps, la jeunesse s’est caractérisée par une soif d’idéal qui rentrait tôt ou tard dans l’ordre des « adultes » et prenait plus ou moins docilement la suite des aînés. La jeunesse est en effet un état transitoire sur lequel on ne peut fonder l’absolu d’une société. Or nos jeunes, du moins chez leurs leaders, se sont montrés fort peu jeunes, occupés surtout à se préparer une condition bourgeoise et hypnotisés par leur part du gâteau.
Étrange révolution qui ressemble à un psychodrame au sein d’un Québec narcissique, comme abstrait des contingences fédérales, continentales et mondiales qui auront leur mot à dire sur toutes nos rêveries d’avenir. Ce qui condamne à l’échec la révolte étudiante, c’est qu’elle n’est ni pensée, ni formulée, ni mise en œuvre dans la conscience et la réalité de notre question nationale, reprise à partir de 1760. Aussi sombrera-t-elle vite dans diverses récupérations et le repli sur un micro-social à la taille du Plateau.
Hubert Larocque, Gatineau.