Pourquoi cette insatisfaction alors que la couverture paraissait si généreuse? On sent de puissants enjeux personnels et idéologiques derrière les réticences, les demi-vérités, la dérive anecdotique, et cette oscillation entre l’acquiescement et la réprobation, l’une et l’autre jamais entières.
Ne semble-t-il pas étrange que la cause profonde de l’insurrection du FLQ ait été occultée, non seulement par les médias et les « historiens », mais d’abord par le FLQ lui-même? On revendique l’indépendance parce que, dans un passé plus ou moins lointain, celle-ci nous a été dérobée et qu’elle ne nous a pas été rendue. Or le FLQ prétendait à la liberté des travailleurs et non à celle du peuple québécois, tout comme le PQ a fait campagne pour l’indépendance en en dissimulant la raison sous divers projets socialisants.
La Rochefoucauld disait : « Ni le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement ». Se pourrait-il que la Conquête de 1760 soit ce soleil noir dont la vue serait insoutenable? Il y va pourtant de la vérité historique et partant de la juste approche de tout ce qui en découle, situation politique et sociale, et de l’immense commentaire embrouillé, éclaté et inextricable auquel chaque jour les médias ajoutent une variation.
Pour réels qu’ils soient, les rites démocratiques, les libertés civiques sont enfermés dans le filet des contraintes coloniales toujours présentes dans le cadre de la constitution canadienne et des jugements des tribunaux fédéraux. Les Événements d’Octobre nous rappelaient la fragilité de notre statut et sa soumission ultime à l’ordre imposé par la Conquête.
Quand on a cru avoir tout dit, une grande intelligence et un sens intact de notre identité ne devraient pas se dérober à voir les Événements d’Octobre, dans une liaison simple et foudroyante, comme une répétition de la Conquête de 1760. Seule cette « hypothèse » permet d’expliquer les enjeux de ces jours tragiques, les comportements de l’État, la division des esprits entre la révolte, l’indécision et la collaboration plus ou moins poussées. Quel que soit le parti que l’on croit avoir « choisi », la répression de 1970 pèse sur tous et chacun, par ses effets et son pouvoir obnubilant. Mais au Québec, voulez-vous être incompris? Écrivez en français.
Hubert Larocque
Gatineau. (10-10-2010)