Tout le monde convient de l’« insignifiance » de la campagne électorale. Mis à part Alain Dubuc qui s’évertue à y trouver de l’intérêt, le débat est privé de centre et d’élévation. On en fait une lecture au premier degré qui témoigne de l’inconscience à l’endroit des enjeux de l’arrière-plan. Ce sont pourtant ces enjeux qui commandent les ficelles et qui se manifestent de façon oblique, dégradée à travers nombre de thèmes et d’obsessions récurrents.
La question nationale ne peut évidemment disparaître dans la mesure où rien à son sujet n’a été réglé. La politique des quarante dernières années se présente comme une dérive, une falsification beaucoup plus que comme une avancée ou un progrès de la conscience et de l’action. Aurions-nous cessé d’exister ou serions-nous en train de devenir autre chose sans qu’il se trouve un seul penseur pour le percevoir et nous en avertir? C’est peut-être la vraie conclusion du Rapport Bouchard-Taylor. Cela voudrait dire aussi que nous n’avons aucun penseur digne de ce nom. Nos « artistes » se préoccupent au premier chef de mendier des subventions fédérales. L’art lui-même nous a désertés dans une sorte de sociologie de la collaboration.
Le principal vecteur de la question nationale passe par l’interrogation sur la pertinence du Bloc québécois. Les « fédéralistes » feindront de le tenir pour inutile, coûteux. Un peu comme le renard de la fable, ils tournent autour de l’arbre où le corbeau (Québec) tient le fromage dans son bec. Laissez tomber le fromage, c’est-à-dire le Bloc. La suite se devine. Elle a déjà été jouée nombre de fois. Quand le Québec détenait à Ottawa une majorité de députés pancanadiens, les Trudeau, les Chrétien n’ont servi qu’à imposer au Québec la loi du Canada anglais. La « démocratie » a permis ce détournement, cette trahison.
Hubert Larocque, Gatineau