M. Charest, je maudis votre gouvernement !
Réf. : « Le gouvernement du Québec enfreint encore sa propre loi »
Je maudis ce gouvernement qui travaille avec assiduité (!) à rebilinguiser le
Québec à l’image de ce qu’il était dans les années cinquante et soixante, voire
soixante-dix.
J’ai même une amie – et je n’invente rien, veuillez m’en croire (d’ailleurs
le phénomène se révèle très aisé à vérifier) – qui a plus d’une fois été refusée
à des postes au sein de la Fonction publique québécoise (postes pourtant
« subalternes » de commis, qui n’exigeaient aucune spécialisation ni de contacts
avec des pays étrangers, pas même le Canada, et ce en dépit, au surplus, d’un
bon curriculum, une belle, délicate et solide personnalité et, enfin, …une
maîtrise impeccable de la langue française!).
Pour une minorité de 8% d’anglophones (en regard à une francité à hauteur de
82% et une allophonie – intégrée à la majorité linguistique par le biais du
système d’enseignement – qui atteint désormais les 10% de la population
globale), le gouvernement québécois actuel exige le bilinguisme intégral du
personnel de l’Appareil d’état.
Or qu’est-ce donc que pareille politique, sinon la destruction même de notre
identité linguistique et culturelle depuis les plus hautes instances de l’état
???
Et ce, faut-il le rappeler, au sein d’un état officiellement français.
Un état «gardien» de notre langue qui réclame même du dernier de ses
fonctionnaires – ô les ridicules d’un peuple en voie accélérée de recolonisation
– une boîte vocale… bilingue !
Bref, pour un citoyen québécois il est donc devenu impossible de travailler
en français au sein du seul état français des Amériques continentales.
Non mais… rêvons-nous – au gaz – ou bien il s’agit dans la présente d’un
hurluberlu xénophobe qui désire… «bouffer de l’anglais» ? Non point ! Nous
retournons bel et bien cinquante ans en arrière sans le moindre sursaut de
dignité collective, tel un peuple-troupeau qui avalise passivement, et tout
naturellement, son propre anéantissement.
Or pendant ce temps, l’insulte s’ajoutant radicalement à l’injure, il est le
plus souvent extraordinairement difficile, voire impossible, de communiquer en
français – hors Québec (et même depuis le Québec si le service concerné est
situé hors du territoire québécois) – avec ce pays officiellement bilingue nommé
Canada.
Récapitulons :
1 -> Un pays bilingue qui vit et ne communique qu’en anglais (ou très, très
peu s’en faut) : l’équipe ministérielle du gouvernement Harper reflète à
« merveille » cet état de fait.
2 -> Une nation québécoise française condamnée au chômage si elle ne peut – ou
ne désire point, par dignité ou simple respect de soi – échanger tous azimuts
dans la Canada’s Tongue avec ses propres concitoyens québécois qui
forment cette minorité de 8%. Allez ! Ouste ! Tous à l’anglais sans exception –
tous ! – pour plaire au groupuscule de p’tits messieurs et de p’tites mesdames
qui, à Montréal, Pointe-Claire ou Pontiac, estiment qu’ils vivent non point au
Québec, mais bien… in Canadamerica.
Comme dirait l’autre : Cherchez l’erreur !
Of course. That’s the Country of Jean Charest, Denis Coderre et… des
trois quarts des aspirants à la chefferie du Liberal Party of Canada qui
ont peine à dire «Bonjour» et «Merci» dans la langue seconde de Stephen Harper.
D’où, j’imagine, ou enfin je le présume, l’urgence pour M. Charest (visionnaire
de grande intelligence et doué d’un haut sens de l’état, comme chacun sait)
d’inoculer la langue anglaise dans le cerveau des enfants québécois dès
l’entrée, à cinq ou six ans, dans le système public d’enseignement
(concurremment, pour ce qui est du lot massif et croissant des diplômés
universitaires qui maîtrisent la langue française comme des déficients
intellectuels, eh bien on en reparlera dans vingt ou trente ans. Mais allez
savoir dans quelle langue…).
M. le premier ministre Jean Charest, M. le ministre du travail Laurent
Lessard, Mme la ministre de la Culture et responsable de la Charte de la Langue
française Line Beauchamp (en qui, madame, je persistais aveuglément à garder
confiance en dépit de votre invraisemblable incurie dans des dossiers aussi
névralgiques que ceux-ci), je maudis désormais votre gouvernement.
Je le maudis du plus profond de mon être, de mon âme, de ma chair.
C’est la violence, un peu plus chaque jour, que vous inoculez dans mes
veines. Oui, la violence. Et rien d’autre.
Car vous êtes, monsieur John James Charest, avec la complicité de votre
équipe gouvernementale qui a également perdu (mais l’a-t-elle déjà possédé ?)
tout sens authentique de l’état, un assassin de la dignité québécoise.
Marcelin Gélinas
M.Gelinas@moncanoe.com
Capitale nationale, 15-06-06